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Signaux forts N°13

"Les Signaux Forts du mois de juillet!"

🗣️ Les tilts… (ce que l’on entend si on secoue très fort la société)

Une dissolution, deux tours, trois blocs et… dix réconciliations !

🥊 L’objet

Le moteur (diesel) de l’extrême droite allemande

💡 3 idées anti-prêt-à-penser® 

Le bug comme moyen de réflexion, la commodité comme piège du quotidien, l’IA comme futur du CEO ?

 

📙 Le book club

Hospitalité vs inhospitalité : le dilemme de l’époque ?

👀 L’oeil du Docteur Jequier (Président de l’Institut Bona fidé)

Un pays ingouvernable ? Et si on regardait les mesures qui font consensus dans l’opinion ?

Bonnes lectures !

Signaux forts 13 « Les Signaux Forts du mois de juillet! »

Les Signaux Forts du mois de juillet !

Tous les deux mois, l’actualité des idées, les tendances qui incarnent le changement et les mouvements inattendus de société.

Signaux Forts est la newsletter de l’agence conseil Bona fidé. Si vous prenez du plaisir à nous lire, n’hésitez pas à transférer cet e-mail et partagez-nous autour de vous 👯

Les signaux du mois

🗣️ Les tilts… (ce que l’on entend si on secoue très fort la société)

Une dissolution, deux tours, trois blocs et… dix réconciliations !

🥊 L’objet

Le moteur (diesel) de l’extrême droite allemande

💡 3 idées anti-prêt-à-penser® 

Le bug comme moyen de réflexion, la commodité comme piège du quotidien, l’IA comme futur du CEO ?

 

📙 Le book club

Hospitalité vs inhospitalité : le dilemme de l’époque ? 

👀 L’oeil du Docteur Jequier (Président de l’Institut Bona fidé)

Un pays ingouvernable ? Et si on regardait les mesures qui font consensus dans l’opinion ?

Bonnes lectures !

LE TILT

UNE DISSOLUTION, DEUX TOURS, TROIS BLOCS ET… DIX RÉCONCILIATIONS !

Écrit avant l’annonce de la dissolution, Bona Fidé vient de faire paraitre un abécédaire de la réconciliation (de A comme Amour à Z comme ZAD en pensant par D comme déconnexion, N comme ni-ni, R comme République ou encore W comme Wokisme) à l’occasion des Rencontres économiques d’Aix-en-Provence, consacrées aux défis de « relier les mondes » et de surmonter les fractures françaises.

Préfacier de l’ouvrage, l’ex-président de la République et tout nouveau député François Hollande y insiste avec conviction : « il n’y a pas de société harmonieuse, de cohésion nationale, de solidarité effective, de démocratie durable sans un effort de dépassement ». Il est en effet frappant de constater combien la séquence politique actuelle offre des résonances fortes et significatives avec l’idée de réconciliation. Sans que le propos soit exhaustif, on peut en pointer dix qu’il serait urgent d’opérer dans la France d’aujourd’hui, dix réconciliations, toutes essentielles :

–    La réconciliation d’abord des deux France, métropoles d’un côté et territoires oubliés de l’autre (rural et périurbain mêlés), présentées comme les deux faces d’un pays hyperpolarisé, que de nombreuses études ont détaillées et documentées.

–    La réconciliation de toutes les France aussi, ce pays d’archipels que fracturent des questions aussi essentielles que l’immigration, les inégalités entre riches et pauvres, les tensions autour du pouvoir d’achat, créant parfois un parfum ambiant de guerre civile.

–    La réconciliation du peuple et des élites, déchirure particulièrement vive que l’on a pu lire dans les moqueries contre certains candidats du RN, dans la situation profonde d’une circonscription emblématique comme celle de François Ruffin dans la Somme ou dans la place toujours forte du diplôme dans la structuration des comportements électoraux.

–    La réconciliation des émotions et de la raison, tant la séquence dont nous sortons a montré la part de plus en plus essentielle des émotions dans la vie sociale et intime de nos contemporains, au détriment souvent de la vérité et de la raison.

–    La réconciliation du subjectif et de l’objectif, l’expérience vécue et le ressenti personnel l’emportant de plus en plus sur des faits considérés comme objectifs, phénomène encore accentué par le floutage progressif de la démarcation entre médias d’information et d’opinion.

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–    La réconciliation du je et du nous, un je omniprésent que Vincent Coquebert, inventeur du concept d’égocène et théoricien de la société du cocon a analysé, mais que l’on peut confronter au retour du collectif, avec le rôle majeur de la société civile et des corps intermédiaires dans le « barrage » contre l’extrême-droite.

–    La réconciliation de la protestation et de l’adhésion, l’équilibre entre ces deux dimensions dans le vote RN ayant largement occupé les politologues, dans une élection dont la logique s’est bien plus inscrite dans le « contre » que dans le « pour« .

–    La réconciliation de la politique et de la République, face à un risque d’effondrement qui a été (et reste) ressenti, au regard de la question constitutionnelle qui revient en force, du front républicain bien sûr et aussi du rebond de participation lors des élections législatives.

–    La réconciliation d’hier et demain, un demain omniprésent dans la difficulté grandissante de beaucoup de français à se projeter (seuls ou en groupe) dans un avenir désirable, et un hier qui semble donner le ton d’une France nostalgique avec l’omniprésence du « c’était mieux avant »

–    La réconciliation enfin de toi et de moi, peut-être l’une des plus importantes, tant ces élections ont marqué combien les divisions du pays pénétraient dans la sphère intime, une ambiance qui n’est pas sans évoquer les périodes de fractures les plus profondes (comme l’affaire Dreyfus).

Au jeu des réconciliations, bien d’autres figures sont possibles. Faites l’essai et vous verrez combien cette idée est l’un des grands signaux forts de la France d’aujourd’hui.

L’OBJET

LE MOTEUR (DIESEL) DE L’EXTRÊME DROITE ALLEMANDE

« Sauver le diesel !  » : une publicité pour un nouveau modèle de grosse cylindrée bavaroise ? Que nenni : un slogan de campagne du parti d’extrême droite Alternative für Deutschland (AfD). Pourquoi diable un mouvement politique nationaliste, xénophobe et populiste qui nous avait plutôt habitué aux mots d’ordres classiques du type « dehors les étrangers » (« Ausländer raus ! » dans la douce langue de Goethe) prend-il fait et cause pour le moteur à allumage par compression inventé par Rudolf Diesel à la fin du XIXème siècle?

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Pour comprendre ce qui se joue, il faut remonter quelques années en amont : en 2015, l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) révèle que le groupe Volkswagen a volontairement trafiqué les tests d’homologation de ses véhicules diesel pour les faire passer pour moins polluants qu’ils ne l’étaient. Le dieselgate est l’un des plus gros scandales de l’histoire de l’automobile. Du jour au lendemain, le moteur diesel, qui avait pourtant bénéficié (en France et ailleurs) d’avantages fiscaux substantiels pendant des décennies, est mis à l’index. Il faut dire que les effets sur la santé humaine sont franchement désastreux. Conséquence : les grandes villes annoncent son bannissement imminent – à Paris, on parlait même d’une interdiction dès 2024 – et les ventes s’effondrent. Jusqu’en 2016, la majorité des voitures neuves vendues en France embarquaient un moteur diesel ; en 2023, elles n’étaient plus que 9,5%.

Revenons donc à nos moutons. Le gazole, moins cher à la pompe, était historiquement le carburant des gros rouleurs et des classes populaires. Les partis d’extrême droite ont vite flairé le bon filon, et la disgrâce du diesel est devenue le symbole de l’écologie dite « punitive ».

Partout en Europe, les partis d’extrême droite – depuis le Rassemblement National français au PVV néerlandais, en passant par les nationalistes des Vrais Finlandais – jouent désormais la corde d’un climato-scepticisme assumé. Comme le pointe Jean-Yves Dormagen dans un excellent article paru dans la revue Le Grand Continent, la transition écologique a fini par devenir un motif de clivage en Europe. Cela faisait belle lurette aux États-Unis, où Donald Trump résume son programme de la manière suivante : « forer, forer, forer ! »

Le diesel, avec le barbecue ou la chaudière au fioul, est l’un des totems du backlash écologique en cours. Dans un pays fracturé entre métropoles et « France périphérique » – le résultat des élections législatives est venu une fois de plus confirmer le diagnostic – la peur de « l’écologie punitive » se superpose à peu près parfaitement avec les angoisses identitaires… Autant dire que la transition ne s’annonce pas exactement comme un long fleuve tranquille dans les années qui viennent…

LES IDÉES ANTI PRÊT-À-PENSER®

Vive le bug : joue-la comme Socrate !

Dans « Éloge du bug – Être libre à l’époque du numérique », le philosophe Marcelo Vitali-Rosati interroge ce démon qui hante nos vies numériques si parfaitement huilées et sans frictions : le bug. Il fait la fête au trouble-fête de tout ce qui est vendu comme simple et intuitif. Lecture stimulante qui, via le bug, nous affranchit des si bien nommés « systèmes d’exploitation » … Où l’on découvre que Socrate lui-même chérissait le bug : « bugger » lui permettait de réfléchir et de questionner autrement le monde. Et si le bug était le meilleur outil de lutte contre le prêt-à-penser® ?

Éloge du bug – Être libre à l’époque du numérique, de Marcello Vitali-Rosati (La Découverte)

La vis sans fin de la commodité : lassitude de la lissitude.

L’essai évoqué ci-dessus est à mettre en résonance avec The Tyranny of Convenience, un article passionnant paru en 2018 dans le New York Times où Tim Wu interrogeait aussi ce paradigme de la commodité, cette « lissitude » comme valeur ultime de la technologie – de la machine-à-laver à la Silicon Valley – censée empêcher toute friction et nous libérer de toutes les contraintes, mais qui agit au contraire comme une vis sans fin nous aliénant toujours plus dans une cascade de micro-tâches à l’infini… Vertigineux.  https://www.nytimes.com/2018/02/16/opinion/sunday/tyranny-convenience.html

Robots managers : va-t-on passer du C.E.O. au C.IA ? 

Tremblez CEO ! Vous pensiez votre fonction à l’abri de la vague de « grand remplacement » de l’IA ? Que nenni. Un papier de David Streitfeld dans le New York Times évoque les dernières hypothèses et expérimentations sur le robot-manager : et diantre, elles semblent plutôt concluantes ! La supériorité d’un robot sur un dirigeant humain selon les experts interrogés ? L’IA est « rapide », « sans biais », « rationnelle », « impartiale » et donc « sert mieux les intérêts de l’entreprise ». La question que l’on se pose à Signaux Forts chez Bona Fidé est de savoir s’il est souhaitable qu’un CEO soit rationnel et impartial ? Un CEO ne doit-il pas au contraire, comme Socrate, « bugger » et cultiver ses biais ? Discutons-en !

https://www.nytimes.com/2024/05/28/technology/ai-chief-executives.html?searchResultPosition=3

LE BOOK CLUB

HOSPITALITÉ VS INHOSPITALITÉ, LE DILEMME DE L’ÉPOQUE ?

Les résultats des récentes élections législatives et la forte progression du vote pour le RN en témoignent : il existe en France ce que Myriam Revault-d’Allonnes appelle un « lepénisme d’atmosphère », état d’esprit dans lequel le rapport à l’étranger (immigration et frontières mêlées) ne constitue pas l’aspect le plus anodin. Félicien Faury, auteur d’un essai très remarqué sur les électeurs du RN, a souligné cette « racialisation de la question sociale » alors que le président de la République n’a pas hésité, durant la campagne, à parler « d’immigrationnisme » pour stigmatiser le Nouveau Front Populaire.

Derrière la montée en puissance de la question de l’immigration (portée aussi par les débats liés à l’adoption du Pacte européen sur la migration et l’asile et la nouvelle loi française sur l’immigration) se cachent de multiples ressorts (déclassements, colères, ruptures sociales, déprises sur l’avenir…), qui font l’objet de nombreux débats. Bien évidemment, la question première n’en reste pas moins celle de l’accueil : « Accueillir ? Ne pas accueillir ? Pourquoi l’hospitalité ? Pourquoi l’inhospitalité ? ».

À travers son ouvrage intitulé « Inhospitalité », le philosophe Jacob Rogozinski s’est employé à revisiter la notion d’hospitalité via de multiples lectures (religieuses, psychanalytiques, éthiques…) avant d’énoncer ce qui aujourd’hui semble l’affaiblir et même la gripper, renforçant son versant sombre qu’est l’inhospitalité. Un voyage dans le rapport à l’autre très utile pour cerner l’un des aspects les plus à vifs de notre époque, en France comme dans de nombreux pays.

Inhospitalité, de Jacob Rogozinski (La Parole et l’Écrit)

L’OEIL DU DOCTEUR JEQUIER

UN PAYS INGOUVERNABLE ? ET SI ON REGARDAIT LES MESURES QUI FONT CONSENSUS DANS L’OPINION ?

La Chambre est introuvable. Les coalitions « à l’allemande » paraissent une chimère dans une Assemblée française. Et pourtant, il existe des mesures qui fédèrent tous les électorats, une forme de réconciliation de l’opinion, contre la polarisation partisane. Quelques illustrations éclairantes issues d’une étude de l’Institut Bona fidé : 

  • 91% des électeurs de gauche, 87% de ceux d’Ensemble, 86% de ceux de LR et 84% de ceux du RN sont favorables « à la taxation des surprofits dans l’industrie, le pétrole et l’agroalimentaire ».
  • 89% des électeurs de gauche, 86% de ceux d’Ensemble, 82% de ceux de LR et 74% de ceux du RN sont favorables « au conditionnement des aides publiques aux entreprises à des contreparties environnementales et sociales ».
  • 89% des électeurs de gauche, 82% de ceux d’Ensemble, 83% de ceux de LR, 72% de ceux du RN sont favorables « à la limitation des écarts de salaires dans les entreprises de 1 à 20 pour les PME, de 1 à 50 pour les grandes ».
  • 89% des électeurs de gauche, 59% de ceux d’Ensemble, 70% de ceux de LR, 81% de ceux du RN sont favorables « au rétablissement de l’ISF ».
  • 69% des électeurs de LFI, 83% de ceux du PS, 73% de ceux d’EELV, 91% de ceux d’Ensemble, 95% de ceux de LR et 97% de ceux du RN sont favorables « à l’expulsion de tous les étrangers fichés S ».

    (Etude Institut Bona fidé, novembre 2023)

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