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La participation, grande inconnue du second tour

Percutée de plein fouet par la crise sanitaire et la crainte du Covid-19, la participation au premier tour des…

Percutée de plein fouet par la crise sanitaire et la crainte du Covid-19, la participation au premier tour des élections municipales a été faible (44,6%), et de 20 points inférieurs à celle de 2014, et aux estimations des instituts de sondage avant que la crise sanitaire ne prenne de l’ampleur. Cela correspond à peu près à une abstention supplémentaire de plus de 9 millions de Français le 15 mars dernier. Cette faiblesse de la participation a été plus accentuée encore au sein des grandes métropoles (42,3% à Paris, 39% à Lyon,33% à Marseille, 28,5% à Nice, 36,6% à Toulouse, 36,9% à Bordeaux, 34,4% à Strasbourg, 32,6% à Lille, 38,7% à Nantes, 34,6% à Montpellier…), où se jouent souvent les seconds tours les plus serrés.

 

 

C’est logiquement l’électorat senior, plus sensible à la peur du virus, qui s’est le moins mobilisé. Cette participation différentielle entre sous-groupes sociaux a eu un impact sur le scrutin, pénalisant les listes LR et LaREM auxquelles cet électorat est le plus attaché et contribuant ainsi à amplifier les très bons résultats des listes écologistes, plutôt choisies par les moins de 50 ans. A Paris, à Lyon, à Marseille, à Toulouse, les candidats LR et/ou LaREM ont sans doute fait moins bien que ce qu’ils auraient fait avec une participation de 15 ou 20 points supérieure. La participation du second tour sera donc dans nombre de villes décisive alors qu’elle reste évidemment très corrélée à la situation sanitaire, difficilement prévisible. Si les Français ont la perception que la crise est derrière nous et que le virus est quasi-éteint, alors il est sans doute possible de tabler sur une hausse sensible de la participation par rapport au premier tour, et donc une éventuelle redistribution des cartes par rapport au premier tour. En revanche, si le virus reste perçu comme une menace, et si la crainte pour soi et ses proches demeure, la participation ne devrait pas être beaucoup plus élevée qu’au premier tour. Cela est d’autant plus vrai que, pendant le confinement, les enquêtes d’opinion ont montré que 85% des Français considéraient la tenue du premier tour comme une erreur.

 

Cette incertitude rend les pronostics très difficiles. Traditionnellement, la participation évolue peu entre les deux tours d’une semaine à l’autre et la projection des résultats de premier tour permet quasi-mathématiquement d’envisager ceux du second. Ce n’est donc pas le cas pour les élections municipales de 2020. La participation reste une variable indéchiffrable en raison de sa corrélation avec la situation sanitaire. Le fait que plus de trois mois se soient écoulés entre les deux tours est également une variable inédite dans ce type de scrutin. Un temps long qui a bien évidemment pu défavoriser certains candidats (on pense par exemple à Agnès BUZYN à Paris) ou en avantager d’autres.

 

Par ailleurs, ce temps a également mis comme enjeu saillant du second tour pour les maires sortants leur gestion de la crise, un enjeu inexistant dans les choix électoraux du premier tour. Compte tenu de ce délai inhabituel entre les deux tours, d’une mémoire du premier tour qui a pu s’estomper, de ce contexte de crise sanitaire qui a pu modifier les représentations et les opinions ou encore des incertitudes sur le niveau de participation, la lecture des résultats du premier tour pourrait être bien moins prédictive que d’habitude pour les résultats du second. Toute la question est de savoir si, et jusqu’à quel point, les cartes de la mécanique électorale pourraient être rebattues.

 

Samuel JEQUIER

 

Pour aller plus loin, Equancy&Co vous propose d’établir un état des lieux complet à trois jours du scrutin (tendances, analyses et pronostics ville par ville…) en compagnie de Robert Zarader, président d’Equancy&Co et Samuel Jequier, politologue et sociologue.

 

Le webinar aura lieu le jeudi 25 juin de 8h30 à 9h30
Pour vous inscrire, c’est ici : https://urlz.fr/cWJa

Publié le 15/06/2020

Samuel JEQUIER

Directeur général adjoint

Agrégé de sciences sociales, Samuel Jequier a rejoint Bona fidé en 2021, et y dirige l’Institut, qui veille, analyse, produit et réalise des études qualitatives et quantitatives sur-mesure pour les clients de l’agence. Convaincu de la nécessité de comprendre la société et ses rapports de force, féru de politique et d’analyse des comportement électoraux, il flèche les mouvements, harponne les idées, mouline les tendances, ferre les changements. Et désarme l’ensemble des leurres.

Tags : Vie Politique Post

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