Interview de Robert ZARADER pour le Dauphiné, propos recueillis par Francis BROCHET
L’arrivée de Jean Castex à la place d’Edouard Philippe marque-t-elle un vrai changement ?
« Oui… Trois scénarios étaient possibles. Le premier était de conserver Édouard Philippe et son équipe. Mais le président envisage d’infléchir, sinon de bouleverser sa stratégie politique avec un virage écologique, des finances publiques moins rigoristes et un engagement social plus marqué, qui n’étaient pas dans le logiciel d’Édouard Philippe.
Deuxième scénario, un gouvernement plus politique, avec des personnalités comme François Bayrou ou Richard Ferrand, mais les deux sont empêchés par des tracasseries judiciaires. Et personne n’a émergé à la République en Marche pour acquérir une stature de Premier ministre, ce qui est très préoccupant. »
Emmanuel Macron a donc opté pour le troisième scénario…
« Oui, pour un « technocrate de terroir », à la fois énarque, cour des comptes, maire de Prades et amateur de rugby… Emmanuel Macron a parfois des réflexes de banquier : vendre au plus haut et acheter au plus bas… »
Il a « vendu » Philippe au plus haut et « acheté » Castex au plus bas ?
« (Rires.) C’est un constat, pas un jugement !
François Mitterrand avait vendu Michel Rocard au plus haut, et l’Histoire lui a donné raison. »
Édouard Philippe et Jean Castex ont en commun d’être de droite…
« Comme l’électorat structurant d’Emmanuel Macron… Mais le plus marquant est qu’ils ne sont pas d’en Marche ! S’il tient deux ans, aucun Premier ministre du quinquennat n’aura était issu du parti du président, ce qui est inédit. À vouloir rejeter une certaine forme de politique, on a peut-être jeté le bébé avec l’eau du bain. L’important maintenant, est le positionnement de Jean Castex. Il doit être le Premier ministre, non pas le premier des ministres, être à Emmanuel Macron, ce que Didier Deschamps étais à Zinedine Zidane dans l’équipe de 1998 : pas le plus brillant ni le plus médiatique, mais le capitaine qui tient l’équipe. Maintenant, il faut attendre la composition de l’équipe, qui doit être très politique et jouer collectif. »
Emmanuel Macron promet de changer… Vous qui le connaissez bien, l’en croyez-vous capable ?
« Il parle de se réinventer, je crois qu’il doit surtout se retrouver. Comme ministre de l’Economie, il a été remarquablement présent dans la vie quotidienne des Français : magasins ouverts le dimanche, permis de conduire à la poste, cars Macron, etc. Il doit, lui ou son équipe, renouer avec cela. Son autre caractéristique, c’est la disruption, sa capacité à renverser la table… Il doit retrouver cette capacité à surprendre. »
Article sur ledauphine.com
Robert ZARADER
PrésidentRobert Zarader est expert de la stratégie de communication corporate, des relations institutionnelles et média, et des problématiques d’accompagnement du changement. Il a co-écrit en 2008 le livre La bêtise économique puis coordonné en 2021 un ouvrage collectif, l’Abécédaire de la réconciliation, dont une nouvelle version est parue en juin 2024.
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