L’arithmétique des reports de voix explique la large victoire d’Emmanuel MACRON, qui a nettement dominé sa rivale dans les électorats de gauche et dans celui de Valérie PÉCRESSE. Ainsi, 42 % des électeurs de Jean-Luc MÉLENCHON (contre 17 % pour Marine LE PEN et 41 % d’abstention ou de votes blancs et nuls), 65 % de ceux de Yannick JADOT et 53 % de ceux de Valérie PÉCRESSE (contre 18 % pour Marine LE PEN et 29 % d’abstention ou de vote blancs et nuls) ont voté pour le président sortant. Ce résultat permet de considérer que le mécanisme de « front républicain », bien qu’affaibli, a (à nouveau) fonctionné pour cette élection présidentielle.

France heureuse contre France qui souffre, France du haut de l’échelle sociale contre celle du bas, France urbaine contre France rurale : comme attendu, le scrutin a été fortement polarisé. La base sociologique du macronisme (CSP+ et retraités) a fait le succès du président quand Marine LE PEN a renforcé sa suprématie auprès des classes populaires :

  • 77 % des cadres et professions intellectuelles supérieurs, 74 % des diplômés supérieurs à Bac +3, 68 % des retraités, 65 % des hauts revenus et 69 % des Français se disant « satisfaits » de leur vie ont voté pour Emmanuel MACRON ;
  • 67 % des ouvriers, 64 % des chômeurs, 57 % des employés, 56 % des bas revenus et 79 % des Français se déclarant « insatisfaits » de leur vie ont choisi la candidate du Rassemblement national.

Par rapport à 2017, Marine LE PEN progresse dans toutes les catégories sociales comme si le vote RN se diffusait doucement, par capillarité, du bas vers le haut de l’échelle sociale : elle gagne ainsi 11 points chez les ouvriers et les employés, 8 chez les professions intermédiaires et 5 chez les cadres.

En termes de tranches d’âge, le président sortant l’emporte largement chez les jeunes (61 % chez les 18-24 ans) et l’électorat âgé (60 % chez les 60-69 ans et 71 % chez les plus de 70 ans), alors que le rapport de force est très serré au sein des catégories actives (51/49 chez les 25-34 ans, 53/47 chez les 35-49 ans et 49/51 chez les 50-59 ans).

L’opposition est aussi territoriale. Marine LE PEN domine Emmanuel MACRON dans nombre de petites communes où elle arrive en tête (plus de 18 000), signe de son implantation dans ces territoires, alors que le président sortant l’emporte très largement dans les grandes métropoles, avec un score moyen de 73 %, et plus de 80 % à Paris, Lyon et Bordeaux, par exemple. Dans les communes rurales, le rapport de force est beaucoup plus serré, à 50/50.

La candidate RN est majoritaire dans trois régions métropolitaines (Hauts-de-France avec 52,1 %, PACA avec 50,5 % et la Corse avec 58,1 %) et dans 30 départements, alors qu’elle n’en avait remporté que 2 en 2017. Si elle emporte nombre de départements dans ses zones de force (Hauts-de-France, PACA et Grand Est), elle progresse de manière importante et notable dans les départements ruraux du Sud-Ouest, remportant par exemple le Tarn-et-Garonne (52 %). Le RN est également pour la première fois majoritaire en Martinique, en Guadeloupe, à la Réunion et en Guyane.