Manger devant son poste de travail ou devant son ordinateur est une mauvaise habitude, c’est bien connu. Mais ce que nous savions moins, c’est qu’il s’agissait d’une pratique illégale en France jusqu’à très récemment.
Un décret publié au Journal Officiel ce dimanche 14 février autorise en effet désormais les employeurs à déroger à cette règle, lorsque la configuration des lieux habituellement prévus pour la restauration ne permet pas de respecter les règles de distanciation physique. Si cette pratique est maintenant autorisée, elle n’en reste pas moins peu souhaitable pour les salariés tant sur le plan physique que psychologique, comme l’ont montré de nombreuses études ces dernières années.
Ainsi, manger plus vite et avec son attention focalisée sur l’ordinateur diminuerait la sensation de satiété après un repas. Selon des chercheurs de l’Université de Bristol, qui ont mené une étude en 2010, un tel comportement incite à grignoter et favorise l’obésité. Par ailleurs, manger à son bureau rend moins créatif et plus stressé, comme l’ont démontré des chercheurs berlinois en 2013. Ne pas manger devant son ordinateur (et s’accorder une courte marche digestive) permet d’être mieux connecté aux autres et de faire preuve de davantage de créativité.
Si ces arguments ne vous ont pas convaincu, sachez que plusieurs études ont mis en lumière le fait qu’un clavier d’ordinateur peut accueillir des bactéries pathogènes et être jusqu’à 400 fois plus sale… que des toilettes !
Au-delà de l’anecdote, la possibilité donnée aux salariés de déjeuner à leur bureau interroge sur les conséquences à long-terme des habitudes prises pendant la crise sanitaire : devra-t-on s’habituer à manger en quelques minutes, sans s’accorder de pause méridienne ? Faudra-t-il faire une croix sur les moments de convivialité qui font eux aussi partie de la vie professionnelle ? Continuera-t-on à se connecter au premier Zoom de la journée en bas de pyjama, entre deux croissants ?
Alors que la crise sanitaire dure et que le télétravail est amené à se poursuivre (du moins en théorie), certaines de ces habitudes semblent parties pour rester, au risque de générer à long terme une lassitude générale et un appauvrissement des échanges. Et pourtant, être plus stressé et moins créatif n’est pas une fatalité : c’est en faisant individuellement et collectivement des efforts pour lutter contre l’installation de ces nouveaux usages que nous éviterons leur pérennisation !
Quelle solution pour le déjeuner, par exemple, alors que les restaurants sont fermés et que les températures négatives peuvent refroidir les plus motivés à mettre le nez dehors ? Essayez le déjeuner sans herbe !
Pierre MARIE